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Le défi de Franck Lacroix : sauver le TER SNCF

14 mai 2017 | Posté par Alexis dans Actualités

Compte rendu de la réunion SNCF – Associations du 12/05/2017 à Lille

Etaient présents :
Franck Lacroix (Directeur Général SNCF TER), Jacky Lion (Directeur TER Hauts-de-France), Dominique Normant (Directeur TER Picardie), Hélène Marquet (Resp. de lignes Etoile d’Aulnoye)
A. Cosma pour l’Association LUTECE – FNAUT, C. Dupart pour la FNAUT Hauts-de-France, A. Lamotte pour l’AUTAN et l’ADU – FNAUT, G. Laurent pour l’UVN – FNAUT ainsi que deux représentants de l’Association A Fond de Train.

Plusieurs demandes et remarques sont exprimées par les représentants des usagers en 1ère partie de réunion :

– Toutes les associations présentes souhaitent le maintien de l’accompagnement des trains par des agents aptes à assurer la sécurité, l’information des voyageurs et la lutte anti-fraude (les trois sont nécessaires).

– La SNCF doit se concentrer en priorité sur la fiabilité et sur la qualité du service, qui aujourd’hui ne sont pas à la hauteur notamment du fait des pannes et des indisponibilités récurrentes du matériel. Cela doit passer bien avant tous services annexes et autres gadgets.

L’information est jugée très inégale et inadéquate quand les usagers en ont le plus besoin.
Nous évoquons par exemple les longs silences et le manque de crédibilité du compte Twitter TER Picardie, dont les opérateurs veulent bien faire mais semblent parfois manquer de connaissances pour fournir des informations pertinentes et expliquer les causes des incidents.

– Nous déplorons que chaque activité SNCF (TER, Intercités et Transilien) fasse trop souvent passer ses propres intérêts dans la gestion des correspondances et des situations perturbées avent ceux des usagers.

– Le développement du numérique ne doit pas laisser de côté les nombreux usagers qui ne sont pas utilisateurs de smartphones.

– La SNCF doit faciliter les déplacements en train + vélo, en s’inspirant de ce qui existe chez nos voisins européens et en travaillant avec les associations spécialisées.

– Enfin, des interrogations sont émises sur la politique du groupe SNCF qui organise la concurrence frontale de ses propres trains (donc ceux payés par les contribuables) avec ses autocars Ouibus et maintenant ses lignes de covoiturage « IdVroom » alors que ce service devait initialement être un complément du train.

Messieurs Lacroix et Lion ont bien pris note de nos remarques, mais nous n’aurons pas pour autant de réponse claire à chacune d’entre-elle au cours de nos échanges.

Présentation et échanges sur le plan de la SNCF : « CAP TER 2020 »

F. Lacroix commence par un vague discours sur les nouvelles mobilités avant d’entamer la présentation de son plan de transformation du TER.
Il part d’un constat alarmant :

– Après une forte augmentation de l’offre et de la fréquentation impulsée par la régionalisation, TER a perdu 5% de voyageurs (moyenne nationale) depuis 2012.
– Dans le même temps, les coûts d’exploitation facturés par la SNCF aux Régions sont en forte augmentation (ils ont même augmenté plus vite que l’offre !).
– En parallèle, la concurrence se prépare et prospecte les Régions (qui pour certaines, en sont demandeuses) en attendant l’ouverture prochaine du marché.

F. Lacroix a donc deux grands axes de travail :
– Gagner en attractivité pour augmenter les recettes
– Maîtriser les coûts de production

1) Gagner en attractivité

« Si on continue de baisser, on va dans le mur ! »
F. Lacroix ambitionne de faire à nouveau croitre la fréquentation des trains de 5 à 10% d’ici 2020, en partant à la conquête des voyageurs occasionnels, à plus forte contribution, afin d’améliorer l’équilibre économique du service.
Pour cela, il entend articuler le fonctionnement de la SNCF autour des attentes des voyageurs et non autour de son propre système. Vaste programme !

Pour nous et nos collègues des autres associations, l’érosion de la fréquentation peut s’expliquer par plusieurs facteurs importants :
– La dégradation de la qualité de service qui fait fuir les clients
– La multiplication des travaux, qui bien que nécessaires après des décennies de délaissement du réseau classique, doivent encore gagner en productivité et en coordination, notamment concernant les lignes complémentaires telles que Creil – Beauvais dont les usagers pâtissent de fermetures répétitives d’une durée que nous estimons démesurée par rapport aux travaux réalisés. Les plans de transports travaux doivent également être plus soignés.
– Une tarification dissuasive pour les voyageurs occasionnels, hors marché face au covoiturage ou même face au véhicule individuel pour les déplacements à plusieurs.
– Des dessertes qui n’ont pas suivi l’évolution des besoins de mobilité : 3 heures sans train Amiens – Paris en journée, des gares péri-urbaines non desservies pendant 4h, etc.
– L’accès au train de plus en plus complexe en dépit de la mise en place de nouveaux canaux de vente : impossibilité d’obtenir un billet de TER ouvert ou échangeable sur Internet ou smartphone, manque de clarté de la tarification, réduction ou fermeture des guichets, suppression des chefs de bord sur certaines lignes, etc.

F. Lacroix acquiesce note analyse et se prépare à proposer aux Régions une structuration de l’offre en fonction des différents marchés :

  • « TER Chrono » pour les liaisons rapides entre les villes
  • « TER City » pour les dessertes périurbaines (trains à arrêts fréquents autour des grands bassins de population)
  • « TER Proxi » pour la desserte fine des gares rurale

– Chacune de ses offres devrait comprendre des services et une tarification spécifique.
Par exemple, la vente de billets dans les trains TER Proxi (« guichets mobiles ») ou la mise en place de services aux usagers dans les TER Chrono comme la restauration ou le Wi-Fi.
– Cette restructuration passe par une meilleure connaissance de l’utilisation des trains sur un parcours donné afin de mieux répondre aux attentes (on peut d’ailleurs s’étonner que ces données ne soient pas encore connues !).
– Pas de tabou concernant les chefs de bord : l’accompagnement non-systématique n’est pas exclu sur certains services mais a contrario, l’équipage des trains pourrait être renforcé sur d’autres.
– Enfin, F. Lacroix nous assure que la population « non connectée » ne sera pas oubliée.

2) Maîtriser les coûts de production

La SNCF compte agir sur différents leviers :
– l’amélioration de la lutte anti-fraude par la diversification des méthodes de contrôle (qui est déjà largement engagée en Picardie)
– Une utilisation plus rationnelle du matériel, qui évite par exemple les circulations de trains omnibus avec des matériels de forte capacité sur de longs parcours aux heures de pointe, alors que la fréquentation est souvent très faible sur la partie finale du trajet et que le matériel manque sur les sections les plus fréquentées.
– Une réorganisation des journées de travail du personnel pour gagner en productivité.

Le rôle des responsables locaux sera renforcé pour mener cette transformation : ils bénéficieront de plus d’autonomie et pourront prendre plus d’initiatives… Avec des comptes à rendre en contrepartie.

Si nous saluons le volontarisme affiché de M. Lacroix, qui tranche avec la désinvolture qui se dégage de certaines interventions de G. Pépy dans les médias, nous avons cependant émis quelques doutes et quelques réserves :

  • L’optimisation de l’utilisation du matériel en fonction de la fréquentation ne doit pas se traduire par des correspondances systématiques et sans compensation pour les usagers des petites gares et des haltes périurbaines, sous peine de voir leur fréquentation baisser. Nous veillerons à ce qu’un équilibre acceptable entre les différentes attentes soit respecté, en concertation avec les usagers.
  • La segmentation de l’offre envisagée par la SNCF peut avoir des avantages, mais outre la difficulté de structurer de l’offre en 3 types de desserte, certains trains assurant à la fois plusieurs fonctions, elle ne doit pas rendre l’utilisation du train encore plus complexe qu’actuellement.

Nous adressons nos vœux de réussite à M. Lacroix, tant le travail à accomplir pour redresser et relancer le service est important mais nous sommes méfiants quant à l’application concrète des son plan « Cap TER 2020 ». En effet, la rationalisation annoncée, bien que souhaitable sur certains aspects, devra s’articuler autour d’une réelle prise en compte des attentes des usagers.

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